Au nom du père

Je remonte un peu dans le temps pour vous parler d’une démarche que j’ai trouvée assez rigolote malgré son apparente banalité : la reconnaissance anticipée de paternité. Pour une fois, nous avons été au top niveau timing, en nous y prenant bien en avance ! Il faut croire que le futur papa était pressé d’officialiser son statut aux yeux du monde administratif.

Personnellement, j’aurais bien aimé que le moment soit un peu symbolique, parce que je trouve que nos amis les papas n’ont pas le rôle le plus facile, contrairement aux apparences. J’entends déjà les hurlements féministes, me rappelant à juste titre que les femmes ont beaucoup plus de contraintes physiques, qu’elles sont obligées de se sentir rapidement investies d’une mission presque sacrée, les forçant à prendre soin d’elles pour préserver leur progéniture en plein développement. Mais justement, j’admire la capacité des papas à s’impliquer dans l’aventure sans que cela soit commandé par leur instinct. Je me demande souvent si j’aurais été capable de me projeter autant si je ne m’étais pas sentie physiquement connectée à l’alien, du fond des tripes.

Alors j’en profite pour faire un petit big up aux daddies cools, qui mériteraient tous leur heure de gloire au moment où ils déclarent à la face du monde que oui, oui, ils sont bien le père de ce petit bout d’enfant. Un moment un peu épique dans ce goût-là serait totalement approprié je trouve.

Seulement voilà, la réalité est nettement moins glamour… Nos pas vers la reconnaissance de paternité ne nous mèneront pas du côté obscur de la force, mais à la mairie de la riante cité de Beaumont, où nous nous présentons sans cape ni sabre, avec la nette intention de faire bonne impression en notre qualité de futurs-parents-responsables-qui-font-toutes-les-démarches-bien-comme-il-faut.

Premier écueil : Pierre n’a pas de carte d’identité. Heureusement, la secrétaire est coopérative et appelle la mairie de Montluçon, où il est né, pour avoir la confirmation de son identité. (c’est qu’il a une sacrée flopée de prénoms le bougre !) En bonne élève, je brandis fièrement ma carte d’identité -valide de surcroît, malgré une photo très peu contractuelle- quand vient mon tour. Quelques questions bateaux plus tard, la gentille dame nous imprime un petit texte qui stipule en gros que nous reconnaissons tous les deux être les parents du ou des enfant(s) que je porte.

Ce superbe échantillon de dialecte administratif me donne malgré toute sa froideur la nette impression de passer un lasso autour du cou de Pierre lorsque je le vois signer… Mais on doit visiblement être sur la même longueur d’onde, puisqu’en sortant du bureau il me glisse : « Ça y est, t’es dans la merde, tu peux plus te débarrasser de moi. » Une petite coïncidence toute bête, qui aura au moins le mérite de rendre ce moment banal et barbant un peu plus symbolique. Ou, comme le disait ma sœur quand elle était petite, pour briser le silence embarrassé de la famille devant la scène hot où les héros du film se décident enfin à copuler : « C’est beau l’amour ! »

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